Les divers matérialismes des XVIIIe, XIXe, XXe siècles ont souvent fait de Spinoza leur ancêtre. Mais, stricto sensu, cette revendication n’est pas possible si elle signifie la dérivation, ou la déduction, de la pensée à partir de la matière. Par contre, si le matérialisme consiste à rapporter au corps tout événement de la vie psychique, affective, individuelle comme collective, Spinoza inaugure un matérialisme inédit, où affirmation de la puissance d’agir et affirmation de la puissance de penser sont données en simultanéité. Matérialisme sans suite, même si le mouvement issu de Marx, poursuivi à titres divers, voire opposés, pour les divers marxismes, est celui qui a le moins mal entendu la leçon spinozienne en ce qu’elle unit, dans la même configuration, désir et entendement, force et imagination, éternité et historicité spécifique. Mais Spinoza ne peut pas davantage se couler dans un matérialisme devenu dialectique. La réforme de l’entendement qu’il promet, concerne du même mouvement les illusions téléologiques et les prétentions du rationalisme absolu de l’autoproduction humaine. Le projet d’un matérialisme de la pratique dans la finitude serait-il l’avenir de la philosophie ? L’ouvrage entend explorer les suggestions inépuisables d’un penser qui saisit l’activité de la libération sans la fétichiser comme empire dans un empire, sans la concevoir comme fantasme de maîtrise.
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