De la pensee qui n'est plus metaphysique, Heidegger dit qu'elle est moindre que la philosophie, plus pauvre que celle-ci, precisement parce qu'elle ne se tient plus a la hauteur d'une pensee de la fondation et que, loin de pouvoir rendre compte d'elle-meme, elle est, dans sa finitude et son essence provisoire, tout entiere au service de ce a quoi elle repond, a savoir l'evenement meme de l'etre. Ce a quoi une telle pensee donne conge, c'est en effet a la structure onto-theo-logique du discours metaphysique de la fondation, au profit de ce que Heidegger nomme, dans son dernier seminaire, une phenomenologie de l'inapparent . On ne peut guere s'autoriser de cette expression pour arguer, comme on l'a fait deja bien des fois, d'une derive vers la poetique ou la mystique de la pensee heideggerienne. Car cet inapparent ne renvoie a aucun arriere-monde, mais seulement a cette inapparence qui reside en tout apparaitre, a cet etre de l'etant que la philosophie au sens traditionnel de ce terme n'est parvenu a penser que sous la figure etante du fondement. C'est dire que ce que Heidegger nomme fin de la philosophie ne signifie nullement son aneantissement, mais ouvre au contraire la possibilite d'une appropriation plus authentique de ce qui a ete en question depuis le depart en elle. A la fin de la Lettre sur l'humanisme, Heidegger declarait: La pensee a venir ne sera plus philosophie, parce qu'elle pensera plus originellement que la metaphysique, mot qui designe la meme chose . C'est de cette pensee plus originelle, telle que Heidegger n'a cesse d'en preparer la venue depuis les annees trente, dont il est question dans les essais reunis dans ce recueil.
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