L’Âme de l'homme sous le socialisme d’Oscar Wilde (1854-1900) fut publié pour la première fois à Londres dans la Fortnightly Review, en 1891. L’auteur est devenu célèbre l’année précédente, avec la parution du Portrait de Dorian Gray. Dans la préface de ce roman, Wilde développe une conception très paradoxale ("perverse", diront certains critiques) de la littérature, de l’esthétique et de l’art en général : seul compte le beau, et le véritable créateur ne doit se soucier ni de l’utile, ni de la morale, ni de l’opinion. C’est cette théorie qu’il reprend dans cet essai, en apparence plus politique, où l’enjeu de l’épanouissement individuel est élargi à la société entière : avec une violence redoublée, un sens de la formule et un humour dignes de son ami George B. Shaw, Wilde s’en prend à tout ce qui peut contrarier le libre développement de l’individu, de la propriété privée à la démocratie et… au journalisme. Car le “socialisme” dont il souhaite – ou feint de souhaiter – l’avènement, plus proche de l’idéal de la Fabian Society (cercle réformateur créé en 1884) que de la dictature du prolétariat, ne peut correspondre à ses yeux qu’au triomphe… d’un individualisme intégral, qu’il définit comme « nouvel héllénisme». Le texte ne fut – discrètement – proposé en librairie qu’en 1895, au moment où Wilde se trouvait déjà en prison, après sa condamnation pour homosexualité.
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